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Environnement : les publicités sous surveillance

 

Depuis 2008, l’Autorité de Régulation de la Publicité (ARPP) et l’Agence pour la maîtrise de l’énergie (Ademe) réalisent tous les deux ans un bilan des publicités où apparaît le thème de l’environnement. Le dernier en date fait état de 94% de campagnes conformes aux règles déontologiques et constate davantage de « green-washing » sur les réseaux sociaux. Décryptage.

Profiter de la journée mondiale des océans pour vendre une marque de cosmétiques bio. Présenter un pot en verre recyclable à 25% comme un emballage « écoresponsable ». Montrer une voiture roulant sur un espace naturel. Toutes ces publicités ont été épinglées par le dernier bilan « Publicité et Environnement » réalisé en 2017 par l’ARPP et l’Ademe, qui a passé 736 publicités au crible.

Son rôle principal est de filtrer les publicités susceptibles de tromper les consommateurs en ayant recours au « greenwashing ». Méthode de plus en plus utilisée par les annonceurs dans le but de surfer sur la tendance du respect de l’environnement.

Règles déontologiques

Ce bilan est né il y a plus de dix ans, en avril 2008. A cette époque, les professionnels, (annonceurs, agences, médias…) ainsi que l’ARPP (anciennement le BVP) signaient une charte avec le Ministère de l’Écologie, de l’Énergie et du Développement Durable. Celle-ci comprend dans un premier temps un renforcement des règles déontologiques des signataires. Puis la possibilité de demander conseil à l’ARPP avant la diffusion d’une publicité mettant en avant un argument écologique.Enfin, un bilan annuel sur la publicité́ diffusée. A noter que cette vérification ne concerne pas les publicités télévisuelles, soumises à un contrôle systématique avant diffusion.

Les différents secteurs d’activité concerné par cette charte sont les suivants : l’agriculture-jardinage, l’alimentation, l’ameublement- décoration, les appareils ménagers, l’automobile-transport, les bâtiments et travaux publics, les boissons, l’entretien, l’énergie, l’hygiène et la beauté́, et l’immobilier.

Véhicules motorisés en cause

En 2017, le bilan montre que 94% des publicités incluant un argument commercial environnemental sont jugées conformes aux règles légales et déontologiques en vigueur. Une proportion stable depuis 2008, qui reste toutefois en deçà des autres thématiques analysées par l’ARPP. Au total, 47 visuels se révèlent non conformes aux règles déontologues. La moitié des manquements concernent la présentation de véhicules motorisés sur des espaces naturels.

On utilise le terme « manquement » lorsqu’une publicité incite les consommateurs à adopter un comportement non écoresponsable. Ou bien lorsque les arguments basés sur la sauvegarde de l’environnement sont employés au détriment du réel impact écologique du produit ou du service.

Piscines pas si naturelles

On distingue également plusieurs sous-catégories de manquements. Lorsqu’une entreprise exprime une promesse globale en termes de développement durable alors que son engagement n’est pas vérifiable, on parle de « véracité des actions ». C’est-à-dire que l’annonceur doit être en mesure de justifier les arguments ayant un attrait écologique au moyen d’éléments sérieux.

Par exemple, l’entreprise Créa’ Paysage met en avant sa capacité à commercialiser des « piscines naturelles », sous prétexte que leur aspect physique se rapproche d’un point d’eau naturel. En revanche, leur offre n’est pas plus « naturelle » que d’autres piscines dites classiques.

Proportionnalité des messages

Autre règle à vérifier, la proportionnalité des messages. Le propos publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, sans abuser sur certains points dans un but commercial. En effet, le message diffusé doit être proportionnel aux efforts fournis par l’annonceur en termes de sauvegarde écologique.

Exemple : ce post Facebook de Léa Nature, qui affirme que « Protéger les océans, c’est notre nature ». Si l’entreprise commercialise bien des produits issus de l’agriculture biologique, son engagement dans la sauvegarde des océans ne se fonde pas sur des preuves tangibles. 

Logos et vocabulaire

Par ailleurs, les signes et symboles sont si nombreux dans notre quotidien que l’on a souvent tendance à les confondre et parfois assimiler les engagements de l’un à un autre. C’est dans cette optique que l’ARRP lutte contre des symboles pouvant prêter à confusion. Par exemple, un logo majoritairement vert ou contenant des termes tels que « bio » ou « nature » peut influencer le consommateur sur la provenance du produit.

Les termes et expressions utilisés ne doivent pas non plus induire le public en erreur. Par exemple, le concessionnaire automobile Audi utilise la formulation suivante : « l’écoresponsabilité est aussi un plaisir » pour parler d’une voiture hybride. Ici, le terme « écoresponsabilité » est excessif. Surtout, lorsque l’on se penche sur le bilan carbone d’une voiture électrique, qui est bien plus élevé que celui d’une voiture à moteur thermique…

Présentation visuelle ou sonore

De la même manière que le vocabulaire, les présentation visuelle et sonore ne doivent pas emprunter trop de codes habituellement réservés à l’écologie. En effet, leur impact est immense et l’assimilation d’un visuel à des valeurs est très rapide dans l’esprit des consommateurs.

La campagne d’affiche du laboratoire Biopha illustre parfaitement ces propos. En effet, sur leur affiche, on voit un siphon de douche se transformer en cascade naturelle. Ce qui amènerait à penser que leur gel douche est parfaitement naturel et n’a aucun impact négatif sur l’environnement. Ce qui n’est pas le cas.

Greenwashing et confusion du message

Enfin, la publicité doit s’inscrire dans un contexte de responsabilité sociale en tenant compte du message qu’elle diffuse et l’impact que ce dernier peut avoir sur le comportement des citoyens. Par exemple, le slogan de l’entreprise SEAT pour son modèle Arona, disant : « Les trains disaient horaires, je disais Arona ». Cela incite les citoyens à utiliser leur véhicule personnel plutôt que les transports en commun.

L’une des conséquences du « greenwashing » est qu’il contribue un instaurer une confusion dans l’esprit des consommateurs, qui ont du mal à distinguer le vrai du faux. Ils sont ainsi de plus en plus nombreux à devenir méfiants vis-à-vis des produits présentés comme respectueux de l’environnement, ce qui pénalise les entreprises qui font de réels efforts dans ce domaine ! C’est pourquoi le travail de l’ARPP est aujourd’hui essentiel pour lutter contre ces pratiques.