Pourquoi sommes-nous si accros à Instagram ?
Saviez-vous qu’aujourd’hui plus d’un milliard de personnes utilisent l’application Instagram. Parmi eux, 71% ont moins de 35 ans et se connectent en moyenne 53 minutes par jour ! Impressionnant non ? Plongez avec moi dans les coulisses d’une application pas aussi « instagrammable » qu’on voudrait nous faire croire.
Il y a quelques temps, en regardant mon fil d’actualité, j’ai réfléchi à l’impact que cette application avait dans ma vie. J’ai le sentiment d’avoir évolué depuis son installation sur mon téléphone, il y a maintenant 5 ans. D’être devenue plus exigeante dans mes choix (culturel, sportif, alimentation, sorties…) et d’être à la fois plus ouverte à l’inspiration et à la création. Je me suis donc renseignée sur la façon dont Instagram s’immisce dans nos vies et influence nos comportements.
Ce que nous partageons le plus : nous-mêmes
Une étude menée par le département Informatique de l’université d’Arizona a tenté de catégoriser le type de photographies que nous « instagramons » le plus. Les 8 catégories émergeant de cette analyse sont les suivantes : nos amis, la nourriture, les gadgets électroniques, les animaux, nos activités (extérieures ou intérieures, concert), les selfies et la mode. Près de la moitié des photos prises en compte dans cette analyse appartiennent à la catégorie « selfies » (46,6 %), juste devant la catégorie « amis » qui sont aussi généralement des autoportraits. Les catégories « animaux » et « mode » sont les moins populaires parmi ces 8 catégories (moins de 5 % d’images).
Vérification faite sur mon compte Instagram et ceux de mes amis, cette étude dit vrai. Quoi de mieux que de partager les moments sympathiques de nos vies réciproques ? Vacances, soirées et sorties entre amis, paysages magnifiques… tout moment d’évasion y passe et devient public.
L’émergence d’une nouvelle forme de marketing
Mais nous ne sommes pas les seuls accros à Instagram. Même les restaurants s’y sont mis et s’adaptent spécialement pour vous ! En plus de poster des jolies photos de leurs plats, leur décoration se doit de rentrer dans les codes de l’application. J’ai moi-même remarqué que je sélectionne quasiment exclusivement mes restaurants sur Instagram, et que quand je trouve mon plat joliment dressé, je n’hésite pas à le partager…
Comment en est-on arrivé là ? Auparavant, un client « normal » téléphonait pour réserver dans un restaurant que lui avaient recommandé ses amis ou sa famille. Il s’attablait, savourait l’expérience, puis repartait. Il en parlait ensuite autour de lui à quelques personnes qui, comme lui, réservaient.
Aujourd’hui, le client découvre une photo attirante d’un plat sur Instagram. Il consulte le profil du restaurant, clique sur le lien pour faire sa réservation. Arrivé au restaurant, il prend des photos des plats qui lui sont servis et les partage sur Instagram. Et c’est seulement après qu’il savoure son repas, dont la présentation a été pensée à l’avance dans l’idée de sa diffusion sur les réseaux…
Ces nouvelles habitudes ne choquent plus personne. C’est ce dont témoigne sur son blog l’influenceuse Nina (Callmevoyou) : « Avant quand je déjeunais avec quelqu’un au restaurant, je faisais ma mise en place pour une photo et quand je la prenais, il y avait toujours ce moment extrêmement gênant où je devais me justifier en disant : “Ouais c’est pour mon compte Insta en fait”. Maintenant, la personne en face de moi le fait aussi et on ne s’en rend même plus compte »
Les stratégies d’Instagram pour nous rendre accro
Instagram, comme tous les réseaux sociaux, sait comment nous y faire passer beaucoup de temps… Comme le rappelle cette vidéo diffusée par Arte, l’application a été spécialement conçue pour nous faire secréter de la dopamine, la molécule du plaisir, de la motivation et de l’addiction. L’objectif est de nous faire passer un maximum de temps sur l’application en s’abonnant à un maximum de comptes pour que celle-ci récolte nos données et nous propose de la publicité bien ciblée.
L’application développe en nous ce besoin de « validation sociale », qui est fondamentale à chaque être humain. Au quotidien, chacun de nous a peur de passer à côté de quelque chose, et ressent donc le besoin de capturer chaque moment en le prenant en photo et en le publiant ! Instagram est l’outil d’approbation sociale par excellence, notre nombre de likes et de followers étant considéré par le cerveau comme une récompense.
Selon Albert Mandura et sa théorie de la comparaison sociale, nous sommes à la fois actifs et passifs sur Instagram : nous rejetons et adoptons des comportements, observons et imitons les comportements des influenceurs. Le système d’Instagram est aussi conçu pour brouiller les contenus familiers et les contenus commerciaux, afin que notre cerveau ne les différencie plus.
Le côté moins « instagrammable »
Malheureusement ces stratégies bien élaborées seraient nuisibles aux utilisateurs les plus fragiles, au point de susciter angoisses et baisse d’estime de soi. C’est le résultat d’une étude menée par des chercheurs britanniques de la Royal Society for Public Health sur près de 1500 adolescents et jeunes adultes utilisateurs des réseaux sociaux. Sa conclusion : Instagram est le réseau social le plus nocif pour la santé mentale et le bien-être. L’une des chercheuses conclut dans le rapport : « Il est intéressant de voir Instagram et Snapchat les plus mal classés en termes d’impact sur la santé mentale et le bien-être ; ces deux plateformes sont très centrées sur l’image et il semblerait qu’elles suscitent des sentiments d’anxiété, et de n’être pas à sa place, chez les jeunes. »
L’application a donc décidé fin 2019 de lutter contre ce problème en annonçant la suppression des likes des publications. Il serait alors seulement possible de visualiser le contenu des photos, de les enregistrer mais de ne plus les aimer, afin de ne plus créer de sentiment de « dévalorisation » ressenti par certains. « Nous voulons que les abonnés se concentrent sur ce qu’ils partagent, pas sur combien de likes leurs publications recueillent », justifie Instagram. Je n’y verrais pas d’inconvénient, considérant davantage Instagram comme un moyen de partager de jolies choses avec mes proches plutôt qu’une quête permanente d’approbation des autres.