Cyberharcèlement : les femmes journalistes en première ligne !
Les femmes ont 27 fois plus de risque d’être visées par du cyberharcèlement que les hommes selon l’European Women’s Lobby. Un harcèlement violent auquel les femmes journalistes n’échappent pas.
Le cyberharcèlement en ligne est très présent sur Twitter. Selon Amnesty International, 40 % des femmes qui utilisent la plateforme plus d’une fois par jour disent avoir été victimes d’abus en ligne telles que des menaces de violences physiques ou sexuelles ainsi que du harcèlement ciblé. Le 5ème rapport annuel sur l’état du sexisme en France rapporte que les « raids masculinistes » se multiplient en ligne pour réduire les femmes au silence et les discréditer.
Or, les femmes journalistes sont particulièrement concernées par cette situation. Selon une étude de la Coalition against online violence, citée par l’association « Prenons la Une », 73% des femmes journalistes ont été victimes de cyberharcèlement. Pour 20% d’entre elles, les attaques se sont poursuivies hors ligne et un tiers d’entre elles envisagent d’arrêter le métier à cause de ces violences. Selon Mathilde Saliou, journaliste spécialisée dans le numérique et à l’origine de la formation de « Prenons la Une » sur les questions de cyberharcèlement, elles se situent au croisement de deux discriminations : exercer un métier qui suscite la défiance et être une femme. Deux facteurs qui favorisent le risque d’être prises pour cible par des personnes en ligne.
L’expérience de Nadia Daam
L’un des cas les plus marquants pour les journalistes femmes est celui de Nadia Daam, L journaliste a subi un cyberharcèlement très violent. À l’époque, chroniqueuse chez Europe 1, elle critique la plateforme jeuxvideos.com et essuie alors une vague de haine en ligne. De la menace de mort à l’appel au viol en passant par des tentatives de piratage, la journaliste fait face à une violence sans précédent qui va même dépasser la barrière du virtuel. Dans un article du Bondy Blog, elle témoigne : « Cela a été un bouleversement. J’ai déménagé trois fois depuis cette histoire ». Elle a même vécu pendant un temps sous protection policière. « Ça te coupe les jambes et la voix », confiait-elle. La journaliste a même été contrainte d’abandonner des projets professionnels afin de gérer ce harcèlement et protéger sa famille.
Pour expliquer cette violence, Mathilde Saliou explique que les réseaux sociaux, depuis leur création, ont prôné une liberté d’expression totale. Les autorités n’ont mis aucun « garde- fou ». Ce manque de précaution a engendré une liberté de ton de la part des utilisateurs en ligne qui se permettent des paroles qu’ils n’auraient pas nécessairement prononcées hors-ligne. Néanmoins, pour Mathilde Saliou, « il faut arrêter avec l’idée que le monde numérique est différent du monde réel, les deux se mélangent ». De son point de vue, les réseaux sociaux sont la continuité du monde réel
Comment se protéger de ses violences ?
Pour se prémunir des violences en ligne, Mathilde Saliou a travaillé avec l’ONG « Nothing to
hide » sur quelques astuces. Selon elle, il faut apprendre à « s’auto-stalker » : cela
commence par enlever son adresse personnelle de tous les sites internet. Pour « Nothing tohide », il faut se « déréférencer » d’internet pour ne pas donner d’informations personnelles
qui pourraient être utilisées par les harceleurs.
Les femmes journalistes sont ainsi encouragées à séparer leur identité personnelle de leur identité professionnelle en ligne afin d’éviter de devenir la cible d’individus malveillants. Le pire serait qu’elles quittent ces réseaux sociaux pour réduire les risques de cyberharcèlement alors qu’ils représentent un outil de travail indispensable. Des démarches sont d’ailleurs en cours pour faire reconnaître ces violences en ligne comme des accidents du travail.
Retrouvez ici tous les épisodes du podcast imaginé et réalisé par les étudiants d’Audencia SciencesCom