Florence Pagneux : « J’adore mettre des mots sur des situations »
- Journaliste pour La Croix & Okapi (groupe Bayard)
- Parcours : IEP Aix en Provence puis CELSA Paris (école de journalisme)
- Thématiques principales : éducation, insertion, culture, jeunesse
- Présidente du Club de la Presse Nantes Atlantique
- Intervenante en journalisme à Audencia SciencesCom
- Un livre : Guide de l’entrée au lycée (Bayard éditions, 2009)
Journaliste passionnée et toujours à l’affût des nouveautés de son métier, Florence Pagneux a accepté de répondre à quelques questions de curieuses étudiantes.
Quel est votre profil / parcours ?
Correspondante du quotidien La Croix dans les Pays-de-la-Loire, je couvre l’actualité des 5 départements de cette région pour toutes les rubriques du journal (société, économie, culture, politique, religion…). Et je travaille aussi pour Okapi, magazine pour les 10-15 ans, qui appartient au même groupe de presse. Une même mission mais un tout autre ton!
Je suis aussi présidente du Club de la Presse Nantes Atlantique, qui réunit plus de 110 journalistes locaux. C’est un lieu de soutien et de réflexion sur la profession.
Enfin je donne des cours d’écriture sur le web aux étudiants de SciencesCom depuis 4 ans.
Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce métier ?
J’ai toujours été très curieuse. Il me donne la possibilité de rencontrer de nouvelles personnes tous les jours, issus de milieux très divers : élus, artistes, chefs d’entreprises, chercheurs, enseignants, élèves, personnes à la rue, etc.
J’adore écrire, pour le papier comme le web : j’adore mettre des mots sur des situations et les rendre intelligibles et accessibles.
Qu’est-ce qui vous passionne dans ce métier ?
Dans une époque difficile, chahutée de toutes parts, le rôle des journalistes me semble plus important que jamais pour décrypter le monde qui nous entoure. C’est d’ailleurs l’objet de mon dernier éditorial pour le Club de la presse…
J’ai la chance de travailler dans un journal portant une démarche pédagogique : éclairer les personnes sur la société, alimenter le débat démocratique et rendre accessible à tous l’information.
Par exemple, la situation des migrants suscite beaucoup de passions et de débats. J’essaye d’apporter une vision différente : quels sont leurs parcours, comment ils vivent, quel regard ils portent sur notre pays, etc.
Racontez-nous deux expériences marquantes…
J’en ai plein !
Celle qui m’a le plus marquée, c’est de dresser le portrait d’un Angevin qui avait perdu son fils de 36 ans au Bataclan (père de deux jeunes enfants), lors des attentats du 13 novembre 2015. La rencontre a eu lieu l’année suivante au moment des fêtes de Noël et j’y étais vraiment allée à reculons car je trouvais cela très dur. Mais il m’a accueillie à cœur ouvert, m’a montré un appétit de vivre et une grande sagesse.
Je suis ressortie chargée d’émotion et d’admiration.
Une seconde rencontre, plus récente, me vient en tête : celle avec des femmes migrantes qui proposent un service de traiteur à Nantes, au sein de l’association Le goût des autres. Je me suis retrouvée à plusieurs reprises en cuisine avec elles et j’y ai passé des moments extraordinaires…
Et la pire ?
Il y en a beaucoup moins! C’était il y a très longtemps, à France Bleu Provence, le jour de la mort du chanteur Charles Trenet. Je me suis rendue dans sa maison près d’Aix-en-Provence pour effectuer mon tout premier papier radio en direct. J’avais 20 ans et c’était mon premier stage en journalisme…
Le gardien m’a poussée dehors lorsqu’il m’a entendu faire mon direct car il n’a pas apprécié que je le désigne comme tel. J’ai donc été obligée de rendre l’antenne en plein milieu car il était vraiment très énervé… J’ai alors appris qu’il était un ami proche et pas simplement un gardien.
C’était une erreur de débutante, je ne m’étais pas assez renseignée avant de commencer mon direct…
Une personne qui vous inspire ?
Plusieurs même. Mais deux journalistes particulièrement. Deux femmes…
Raphaëlle Bacqué, une journaliste politique du Monde, que j’ai eu la chance de rencontrer à Nantes récemment. Ses portraits m’inspirent particulièrement. Elle possède une rare capacité d’écriture et un vrai talent pour percevoir la personnalité des gens.
Florence Aubenas, toujours au Monde, écrit beaucoup sur la France dite « d’en bas », les territoires oubliés et les gens dont on parle trop peu dans les médias de manière générale. Avec là encore, une très belle plume…
Comment vous voyez-vous dans quelques années ?
Je pense que je ferai beaucoup plus d’articles pour le web que papier.
J’accompagnerai peut-être plus mes textes de contenu multimédia : photo, vidéo et sons. C’est l’évolution naturelle du métier. J’espère surtout me spécialiser dans les longs reportages, les longs formats.
J’ai déjà commencé cette année avec une longue enquête sur les parents en prison dans le Quatre Heures.
J’espère en faire bientôt un autre sur les migrants.
Depuis 4 ans, vous donnez des cours à SciencesCom. Vous animez notamment un atelier d’écriture journalistique. Que souhaitez-vous transmettre aux étudiants ?
La première chose est de leur donner des techniques d’écriture pour rendre leur propos clair, agréable à lire, fluide, bien construit.
Un deuxième point est de les accompagner dans le choix des sujets, par exemple en les aidant à trouver les bon interlocuteurs, en les aiguillant vers les tendances du secteur de la com et les médias, identifier les bonnes sources …
Je les incite aussi à creuser, réaliser des interviews et « angler » leurs articles pour qu’ils apportent une réelle valeur ajoutée.
Un conseil pour les étudiants ?
N’écoutez pas les pessimistes qui disent que le métier est fini, suivez vos intuitions et passions et ça fonctionnera. Pour moi, le métier n’est pas du tout mort, il est en pleine mutation certes mais il peut en sortir quelque chose de bien ! C’est à vous, les jeunes générations, de relever le défi !