Journalisme et Médias

Les médias traditionnels contre le « journalisme citoyen »

Les médias traditionnels peuvent-ils encore rivaliser avec le journalisme citoyen ? 69% des Américains déclarent ne pas avoir confiance dans les médias. Nous sommes en octobre 2024, à la veille de l’élection présidentielle américaine quand Gallup publie cette étude. Cette période de tension, qui voit une Amérique se diviser et s’affronter autour de deux visions de la politique et va générer l’émergence d’un nouveau phénomène. Le journalisme citoyen a connu un véritable essor, lié au rachat de Twitter par Elon Musk. Cette mouvance a assurément influencé le résultat en faveur du candidat Républicain.

Une liberté sans limite pour certains devient vite une prison pour tous.

Albert Camus

La fin du monopole médiatique ou Médias : l’ère du parti pris

Le développement d’Internet a affaibli peu à peu le monopole de la presse traditionnelle dans la diffusion de l’information. Afin d’expliquer pourquoi les Américains se sont progressivement détournés du journalisme traditionnel au profit des citoyen-reporters, il faut comprendre le fonctionnement de la presse aux USA. Au pays de l’Oncle Sam, le 1er amendement garantit une liberté d’expression quasi-absolue à la presse. Ce texte, associé à la suppression de la Fairness Doctrine en 1987 a fait baisser la qualité des médias. Désormais, les chaines TV, radio ou presse écrite deviennent engagé, soutenant ouvertement un des deux camps. 

C’est dans cette situation que Elon Musk intervient, supprimant tout simplement toute forme de modération sur sa plateforme. Pour le justifier, le milliardaire avance l’argument simple : « de qui est-ce qui définit ce qui est vrai ou faux ?». « Dans les temps de tromperie universelle, dire la vérité devient un acte révolutionnaire. » écrivait George Orwell. Libertarien convaincu, Elon Musk se sert régulièrement du livre 1984 pour étayer son propos. Sans chercher si cet argument est valide ou non, nous allons uniquement nous intéresser ici aux conséquences de cette décision qui sont multiples. 

X : l’info sans filtre

En effet, nous pouvons assurément dire qu’Elon Musk a ouvert la boite de Pandore. Désormais, n’importe qui peut faire un post avec des informations non vérifiées plus ou moins erronées. Face à ce phénomène, la plateforme se défend avec la création d’un système de notes de la communauté, toujours dans cet esprit participatif. De toute évidence, ce modèle ne peut ni gérer le volume ni le faire avant que le post ne soit vu des millions de fois. Ainsi la machine se lance, l’algorithme va vous conforter dans vos idées en vous proposant de moins en moins de contenu alternatif. Cette caractéristique du nouveau Twitter exacerbe le communautarisme des Américains, rendant leur cohabitation de plus en plus difficile. 

Dans une société qui préfère le négatif au positif, l’essentialisme au factuel, nous avons du mal justifier cette décision. Au nom de liberté d’expression, nous transformons petit à petit l’information en désinformation. Les Américains, aussi bien Démocrate que Républicain, s’informent désormais plus sur X que sur les médias traditionnels. L’audience observée surpasse très nettement celle de la TV ou de la radio. Or, il s’agit de souvent « d’autoproclamés » citoyen-reporters qui réalise la plus grande part de cette audience.

L’Europe à l’heure des citoyens-reporters

Les USA sont d’une certaine manière le précurseur de l’Occident, les tendances que l’on peut y observer peuvent apparaitre en Europe par la suite. La tendance à s’informer sur des canaux « exotiques » commence à exister en France. Les bénéficiaires de ce mouvement alternatif sont personnalisés notamment en la personne de Idriss Aberkane. Ce dernier se réclame de cette mouvance anti-establishment et multiplie les contenus à charge contre les médias. Il insiste particulièrement sur la notion de complot globalisé où tout le monde serait « complice ». Ses vidéos culminent à plusieurs millions de vues. Le souci ? Il a été prouvé qu’il avait mentis à de très nombreuse reprise notamment sur son CV. 

Les journalistes (en grande majorité) ne se réclament pas d’une vérité absolue, mais leur formation et leur déontologie leur confèrent une rigueur intellectuelle. Chose dont est malheureusement dépourvu l’écrasante majorité des informateurs de X. Il est important que quiconque puisse apporter une contribution sur l’information sans qu’une caste ne la monopolise pas. Cet aspect ne doit pas empêcher d’émettre des réserves sur la prise de place de plus en plus pondérant de cette mouvance.

 

Néanmoins peut-on s’interroger sur la place prépondérante de cette mouvance.

N’hésitez pas à partager si vous avez aimé cet article